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L’absence de majorité stable à l’Assemblée nationale et l’impossibilité de former un gouvernement capable de déterminer et de conduire la politique de la nation pourrait constituer une chance pour notre démocratie : celle d’évaluer les lois votées par le passé et de mieux les penser pour l’avenir. La perspective d’un gouvernement mis en place et maintenu grâce au soutien passif d’une minorité parlementaire va en effet mécaniquement réduire le nombre des textes qui seront soumis au Parlement.
De quoi mettre un sérieux coup d’arrêt à l’inflation législative dénoncée à juste raison par divers acteurs. Car, depuis plus de quarante ans, les lois s’empilent sur un même sujet, sans être suffisamment réfléchies, visant principalement à donner le sentiment que le gouvernement agit et vite. Celles-ci, le plus souvent, ne procèdent pas d’une analyse sérieuse de la réalité sur laquelle on prétend agir, se fixent des objectifs pas toujours très clairs, et mettent en œuvre des moyens pas toujours adaptés.
Ces lois, trop fréquemment, créent ou renforcent des problèmes, contraignant à l’adoption de nouvelles lois afin d’y remédier, nouvelles lois adoptées comme les précédentes selon la procédure parlementaire accélérée et donc pareillement mal conçues. Le tout sous le regard blasé d’un juge constitutionnel refusant de jouer le jeu de la réforme constitutionnelle de 2008, qui lui a confié le soin de contrôler le sérieux des études d’impact (qui accompagnent obligatoirement les projets du gouvernement), sans que jamais il n’ose censurer un texte irréfléchi. Il n’en a pourtant jamais manqué.
Depuis les années 1980, on a ainsi pu dénombrer quarante-neuf lois touchant au droit d’asile et à l’immigration, et plus encore relatives à la sécurité. Les chiffres donnent le tournis : « Au total, le 25 janvier 2022, notre droit comprenait 92 424 articles législatifs et 248 343 articles réglementaires. En vingt ans, il y a donc eu 73 % d’articles législatifs et 53 % d’articles réglementaires en plus. Pour lire toutes nos lois (13,8 millions de mots), un bon lecteur (lisant 300 mots par minute) mettrait 32 jours s’il ne s’arrêtait jamais. Et plus de 102 jours si l’on y ajoutait les décrets », décomptait le journaliste Pierre Januel pour le quotidien en ligne Dalloz Actualité.
Ces lois étaient-elles nécessaires, au sens où l’on n’aurait pas pu s’en passer ? A l’évidence non. Pire, cette instabilité normative est dangereuse à double titre. Tout d’abord, elle est source d’insécurité juridique, puisque les sujets de droit et les acteurs dans ces domaines ne sont plus en mesure de connaître aisément les règles qui leur sont applicables, sans même parler des éléments parfois contradictoires qui finissent par rendre la législation en vigueur totalement illisible.
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